
Originaire de Sibérie, la rhubarbe tient son nom d’une contraction du mot “Rha”, désignant le plus grand fleuve d’Europe, la Volga, au bord duquel poussait cette plante, et du mot “barbarum”, désignant les peuples étrangers qui la consommaient.
D’abord utilisée en Chine pour ses vertus médicinales, la rhubarbe gagna les assiettes en Angleterre au XVIIème siècle et fut importée en France à partir du XIXème siècle.
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Sa saison s’étale de mai à juillet !

La culture de la rhubarbe
Très gourmande en eau, peu en chaleur, le climat du Nord lui offre des sols frais et humides qui lui conviennent parfaitement. En France, la rhubarbe est essentiellement cultivée en Normandie, Alsace et Picardie.
Bon à savoir
Attention à ses belles feuilles ondulées : elles auront fière allure dans votre jardin, mais moins dans votre estomac ! Concentrées en acide oxalique (ce qui donne le petit goût acidulé à ses tiges), les feuilles de la rhubarbe sont toxiques pour nous.
Les bienfaits de la rhubarbe
Un très vieux remède chinois (re)découvert par la science moderne
La rhubarbe est l’un des plus anciens et plus utilisés remèdes en médecine chinoise. Mais ce n’est que depuis quelques dizaines d’années que des recherches à son sujet sont faites (recherches menées essentiellement par des chercheurs chinois cherchant à tester la validité scientifique de ses usages).
Ces études révèlent une quantité importante de composés qui ont tous des intérêts et des applications diverses, parmi lesquels les anthraquinones, les anthrones, les stilbènes et les tanins.

Les anthraquinones
Les anthraquinones appartiennent à la famille des polyphénols, et sont représentés dans la rhubarbe par de nombreuses molécules ayant chacunes des propriétés propres :
> La rhéine est surtout un protecteur des reins : elle a la capacité d’inhiber la formation de fibrose rénale et d’améliorer la néphropathie diabétique (une atteinte des petits vaisseaux des reins par excès de sucre dans le sang chez les diabétiques). Elle a notamment été mise en lumière dans des études sur les rats atteints de maladie rénale chronique. Elle montre également des promesses dans le traitement de la pancréatite aiguë et chronique.
> L’émodine a de nombreux effets pharmacologiques, notamment anti-tumoraux – en inhibant la prolifération cellulaire, induisant l’apoptose et en prévenant les métastases – antimicrobiens, antioxydants et anti-inflammatoires.
> Le chrysophanol et la pariétine (aussi appelé physcion) exercent un effet protecteur sur le système nerveux, en améliorant l’activité de l’enzyme antioxydante, en réduisant les dommages causés aux cellules par les radicaux libres oxygénés, en inhibant la réponse inflammatoire après une ischémie cérébrale et en réduisant les lésions nerveuses causées par la reperfusion. En outre, la pariétine exerce des effets antitumoraux sur diverses cellules de carcinome, principalement en inhibant la prolifération cellulaire, en induisant une apoptose et en bloquant le cycle cellulaire.
> L’aloé-émodine a, quant à elle, beaucoup attiré l’attention en raison de ses divers effets tels que la protection cardiovasculaire, les activités hépatoprotectrices (qui protègent le foie), la lutte antitumorale, antibactérienne, antifongique, antivirale, anti-inflammatoire, immunitaire et laxative !
Sa capacité antitumorale se fait à travers son action sur la protéine p53, un facteur de transcription qui exerce de nombreuses activité antitumoraux dans le corps humain, notamment en favorisant l’expression de gènes qui réparent les dommages cellulaires. Le gène p53 est dit anti-oncogène ou « suppresseur de tumeur ». Lorsque l’on est soumis à des agents cancérogènes, cela peut conduire à la mutation du gène p53, qui entraine alors un risque de transformation de la cellule en cellule tumorale. Plus de 50 % des cancers humains résultent de la mutation du gène p53, ce qui montre l’importance de cette protéine.
Par ailleurs, l’émodine, l’aloé-émodine et la rhéine ont également une action anti-angiogénique, un processus d’inflammation durant lequel de nouveaux capillaires sanguins sont formés. Cette propriété pourrait donc également expliquer l’usage de la rhubarbe en médecine chinoise pour traiter les maladies inflammatoires.
Le piceatannol
Mais les anthraquinones ne sont pas les seuls composés actifs de la rhubarbe, parmi les stilbènes par exemple, on note le piceatannol, un proche cousin du resvératrol qui partage avec lui de nombreuses propriétés, notamment antioxydantes et anti-inflammatoires.
Des études sont en cours pour évaluer les propriétés « anti-âge » du piceatannol (que l’on confère également au resvératrol).
Tous ces composés ont donc montré des capacités anticancers, anti-inflammatoires, protectrices du foie, des reins, du système nerveux… et même anti-diarrhéique !
Beaucoup de ces études sont faites in vitro, certaines sur les animaux, mais malgré tout un certain nombre sur les humains, dont quelques études robustes et autres essais randomisés et contrôlés. Il est donc encore tôt pour conclure sur la pertinence clinique de ces propriétés lorsqu’on les rapporte à une consommation humaine, mais il est intéressant de noter que des traditions orientales ancestrales voient aujourd’hui la science donner une explication à ces propriétés et légitimer certains usages.
En attendant, la rhubarbe, de part sa richesse en fibres insolubles, en polyphénols, et sa faiblesse en calories, a tout pour faire régulièrement partie de vos tables !
Analyse nutritionnelle
Les données présentes dans les tableaux apportent une information sur la quantité moyenne pour 100 g net de rhubarbe crue.
En cuisine !
Fruit du printemps, la rhubarbe est plus souvent cuisinée cuite que crue. Une fois son intense acidité atténuée à l’aide d’une quantité suffisante de sucre, son goût devient fascinant. Les saveurs fruitées de la rhubarbe sont capables de résister à la cuisson et de garder leur fraîcheur, même après l’ajout de sucre. Tarte, compote ou même revisitée dans des plats salés, découvrez de délicieuses recettes à la rhubarbe…
Les petites astuces
Pour bien sélectionner vos tiges de rhubarbe, assurez-vous qu’elles soient bien fermes et denses, sans flétrissures et que ses extrémités ne soient pas sèches. Lorsque votre rhubarbe est bien fraîche, de la sève s’écoule quand vous brisez ses tiges.
Consommez-la dans les 2 à 3 jours après l’achat, elle ne se conservera guère plus longtemps. Conservez-la dans le bac à légumes de votre réfrigérateur.
Bon à savoir, il n’est pas nécessaire d’éplucher les tiges les plus fines. Otez simplement les quelques fils qui s’accrochent au plus grosses tiges. Et pour atténuer son acidité, rien de plus simple : coupez-la en tronçons et laissez-la mariner une nuit dans un saladier de sucre.

Quelques idées pour cuisiner la rhubarbe
1. En salade : son goût intense apportera une grande originalité à vos salades printanières. Une recette iranienne à ne pas manquer : rhubarbe et concombre finement hachés, ajoutés à de la roquette, du jus de citron, un peu de menthe et quelques tranches de saumon. Un vrai délice !
2. En dhal ou en curry : Faites revenir vos épices, légumes et vos tronçons de rhubarbe dans le lait de coco, ajoutez les lentilles et le bouillon de légumes, quelques noix de cajou et brins de coriandre, et le tour est joué. Intégrée à ces différents plats typiquement indiens, vous obtiendrez un mélange de notes acidulées, chaudes, épicées et parfumées. Les notes de fraîcheur acidulée de la rhubarbe viendront relever le goût et l’originalité de ce plat !

3. Avec le maquereau : en compotée, la rhubarbe accompagnera à merveille tous les poissons gras et leur combinaison est délicieuse. Faites fondre des échalotes finement coupées, ajoutez des tiges de rhubarbe, quelques cuillerées de vinaigre de vin rouge et de sucre roux, laissez mijoter et servez-les avec des maquereaux chauds et croustillants.
4. En dessert, seule ou mélangée à des pommes, poires, fruits rouges, la rhubarbe ne vous décevra pas. Associée à des fraises ou des framboises, réalisez toutes sortes de desserts (tartes, crumble, confitures, compotes ou encore en chutney).
La recette nutriting de Chef Félicie
La rhubarbe est à l’honneur dans ce petit tajine printanier !
Un classique revisité par Félicie Toczé, préparez vos papilles 😋
Pour finir, quelques vidéos de recettes pour l’inspiration !
Références
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